Les valseuses
de Bertrand Blier (sortie: le 20 mars 1974)
Scénario de Bertrand Blier & Philippe Dumarçay
Jean Claude (Gérard Depardieu) et Pierrot ( Patrick Dewaere) sont deux amis qui s'amusent à multiplier les agressions et provocations pour tuer le temps. Un jour, ils décident d'emprunter pour quelques heures la voiture du gérant d'un salon de coiffure sans lui demander préalablement son avis. Lorsqu'ils la rendent à son propriétaire, ce dernier les menace avec son revolver en attendant l'arrivée de la police. Les deux compères parviennent à s'enfuir en embarquant avec eux Marie- Ange , la shampouineuse du salon...
" On n'est pas bien là ..." répète à longueur de journée Jean Claude à son pote Pierrot pour finir par dire,cette réplique désormais culte "On est pas bien là. À la fraîche, décontractés du gland... Et on bandera quand on aura envie de bander" Le ton est donné. En adaptant son propre roman, Bertrand Blier nous livre un film totalement décomplexé, sans aucun sujet tabous. D'ailleurs, j'ai été surprise de voir qu'il était encore de nos jours, interdit au moins de 16 ans. J'ai découvert ce film, il y a quelques années par hasard à la télévision. Sa liberté de ton m'avait tout d'abord interloqué et amusé Mais je n'avais pu voir que le début. Quelques temps plus tard, un coffret DVD spécial Patrick Dewaere trône sous le sapin de Noël et les Valseuses fait partie de la sélection. L'occasion donc de découvrir enfin en entier ce long-métrage . Et puis, le charme opérait toujours malgré un côté franchement provocateur et rentre-dedans. Bertrand Blier n'y va pas avec le dos de la cuillère. J'imagine pas le scandale qu'il a du provoqué à sa sortie en salle en 1974. Les situations cocasses dans lesquels se retrouvent les deux marginaux bien- heureux tout au long de leur chemin ainsi que les dialogues acerbes qu'ils se lancent témoignent d'une époque que les moins de 20 ans et je dirais même plus, de plus de 30 ne peuvent pas connaître, l'après - 68 et la révolution sexuelle. Le film évoque également une génération qui s'ennuie dans une France qui , dans les années 70, perd peu à peu de sa prospérité économique. Les Valseuses atteste aussi d'une génération d'acteur. Le trio principal désormais mythique Depardieu, Dewaere , Miou- Miou fonctionne à merveille. On y trouve le Depardieu des débuts, talentueux, bien loin de ces fresques urinaires et aériennes et de l'Obélix remaché. Dewaere et sa fureur naturelle de vivre et de jouer ses personnages en marge mais si attachants. Et Miou Miou est complètement décomplexée dans ce rôle de shampouineuse frigide et qui finit par crier à tout va: " Je l'ai pris !!!" et à la question de ses deux compères " Mais quoi?" répond " mon pied!!" Ils sont entourés pour une scène ou une séquence entière d'autres comédiennes de talent: Brigitte Fossey, en jeune mère en route pour retrouver son mari parti au service militaire, Jeanne Moreau , la femme tout juste sorti de prison et qui se sent prisonnière de son corps de "vielle femme" et enfin Isabelle Huppert qui s'initie aux plaisirs charnels dans les bras des deux amis.
Les Valseuses est une comédie comme on en trouve rarement , à la fois provocatrice , cynique et drôle. Bref, il fallait oser, ils l'ont fait.